Moi - Angoisses

Démarré par Isaac, 15 Avril 2010 à 07:15

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15 Avril 2010 à 07:15 Dernière édition: 19 Avril 2010 à 04:28 par Isaac

N.B. de l'auteur: Cela fait un mois que je travaille sur l'idée de cette "suite". J'ai dû recommencer je pense un total de trois fois.
J'aimais certaines idées, mais j'avais du mal à progresser dans certaines voies avec celles-ci. J'ai donc recommencé au complet, créant donc "Angoisses" plutôt qu'«Innocence» (comme je l'avais annoncé dans mon dernier sujet). Ceci dit, je compte bien réutiliser mes idées que j'avais prévu pour "Innocence", que ce soit ici ou dans une future suite... Qui sait?

Donc avant tout, «Angoisse» n'est pas la suite de «Moi». C'est une histoire qui suit le même courant, mais avec un scénario et des personnages différents... Il est évident que l'effet de surprise sera moins gros maintenant que vous savez un peu à quoi vous attendre... Mais, je tente tout de même.

Dernier détail: Il se peut que je repasse constament sur certains chapitres et que certains soient changés complètement par moment. C'est avec incertitude que je me lance cette fois, nous allons voir ce que ça va donner.

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Je longe le mur à ma droite. Je les vois, je les sens me regarder, me fixer. Qu'ont-ils? Que me veulent-ils? Je sais qu'ils veulent quelque chose. Je me contente d'éviter leur regard en baissant la tête, capuchon sur la tête, mes yeux cachés par mon toupet blond.

Je prends sur la gauche. Les toilettes ne sont pas bien loin. Encore ces gens, ces regards qu'ils posent sur moi, ils me transpercent de leurs yeux, ils me sondent de l'extérieur. Je le sais, je le sens, je le vois, ils me veulent du mal.
Enfin les toilette. Je pousse la porte d'une cabine à toute hâte, je me laisse tomber à genoux devant celle-ci et je crache, un mélangé de bile et du peu que mon estomac contenait. Je tousse, la gorge enflammée, le corps tendu et ensuite épuisé, et je m'appui contre le mur quelques instants, quelques secondes, le temps nécessaire pour reprendre mon souffle.

Je m'avance, les pieds trainants, vers l'évier. Je laisse couler l'eau, le contact froid et soudain me donne un frisson, puis je m'asperge l'eau de visage... Et je me fixe.
Vêtue d'un vieux coton watté gris et sales. Ma frange dépeignée et blonde était bien visible malgré la capuche qui recouvrait ma tête. Je me penche un peu plus, j'étire la peau sous mes yeux cernés et rougies. Je perçois davantage mes taches de rousseurs...

Ellie...

On m'appel.

Ellie!

Je me redresse, les sourcils froncés. Les bruits distants des couloirs de l'école ont cessé. C'est trop silencieux...

ELLIE!

Chapitre 1

La porte de la cabine que j'ai utilisée se referme tranquillement, comme poussée par un doux vent... Je n'entends que la ventilation, rien d'autre. Le silence le plus total, le plus angoissant.
Je quitte doucement les toilettes, puis je fige devant le couloir. Vide, pas un chat, pas un bruit, pas une vie... Les papiers divers trainent toujours sur le sol, éparpillés ici et là, les babillards sont toujours plein d'annonces diverses, les casiers sont encore bien fermés... Une évacuation? J'ai dû manquer l'annonce pendant que je vomissais...

Donc, tout en gardant mon calme, je m'engage vers l'entrée principale du Collège. Je traverse le grand escalier, puis l'air de détente (comprenant quelques fauteuils, quelques tables et quelques terrains de baby-foot), puis je gagne le hall. Mon allée est toutefois vite interrompue...
Incrédule d'abord, la bouche béante, je m'avance vers là où il y avait l'entrée jadis... Où il y a désormais un simple mur de pierre.

Je cogne, je tâte, je pousse. Ce n'est pas une blague, c'est bel et bien un vrai mur. Un vrai de vrai. L'entrée ne peut pas avoir disparu aussi rapidement, c'est impossible, je dois rêver oui, c'est un rêve.

Je me pince... Toujours là.
Ce n'est pas un rêve. Ce n'est pas un rêve.
Les autres entrées... Une fenêtre ou quelque chose. J'avais un cours de littérature dans quelques minutes et il y avait bien des fenêtres.

Sans attendre, je fais le chemin inverse, je monte le grand escalier, je prends à droite dans le couloir, puis à gauche... J'ouvre la porte de mon cours de littérature.

Aucune fenêtre... Un simple mur, sans fenêtre. Qu'est-ce qui se passe bon sens!?

Chapitre 2

Les tables de la classe était couverts de cahiers ouverts, de crayons éparpillés ici et là. Les chaises étaient reculées et il traînait ici et là des sac-à-dos...Ce n'était pas une évacuation. Tout le monde avait littéralement disparu...

Je fais quelques pas, comme perdue dans mes pensées, dans cette absurdité des plus totales... Je m'installe à la place qui m'est attitrée et j'attends... Mais qu'attends-je exactement? J'attendais malgré moi l'apparition imminente d'un élève, du professeur... De quelqu'un.

J'étais dans cette incompréhension depuis à peine quinze minutes et je sentais déjà la panique envahir mon corps, torturer ma pensée et agiter mon cœur dans tous les sens.

Je me ronge les ongles.

Nerveusement.

Je me ronge les ongles...

Nerveuse, stress, calme, je dois me calmer, garder mon calme. Je dois faire le vide, tout va bien, tout est sous contrôle, je n'ai pas à m'inquiéter...

Oui le calme.

La porte de la classe s'ouvre. Je m'immobilise. La professeure entre dans la classe. Je soupir de soulagement, puis je la regarde marcher vers son bureau. Vêtue de sa longue jupe noire habituelle, de son chandail en coton blanc, les cheveux rejoints à l'arrière du crâne de couleur grisâtre, elle marche avec cadence et détermination. Madame Jocelyn qu'on l'appel. Elle dépose ses documents sur son bureau, puis se retourne sans me regarder et agrippe la craie.

Quelque chose cloche...

Elle commence à écrire... Ou plutôt dessiner? Des coups aléatoires, ici et là, dans tous les sens. Elle se donne à son activité pendant je dirais cinq minutes... Je reste là, silencieuse, à observer, à étudier ses gestes.

Jocelyn lâche la craie et se recule... Tous ces traits, ces lignes aléatoires, donnaient l'image d'une... Vitre cassée?! La professeur se retourne pour me regarder.

Je me lève d'un bond. Je recule, j'accroche les chaises et les sac-à-dos. Je fais tomber des crayons depuis les tables.

Jocelyn n'avait plus de visage, qu'un simple petit trou au milieu de celui-ci d'où j'entendais sa respiration... Et malgré l'absence d'yeux, elle me fixait!

Nous restons là, debout, à nous « regarder » (bien que je ne puisse pas vraiment dire qu'elle me regardait)... Et sans crier gare, elle reprend ses documents et quitte la pièce avec la même détermination qu'elle est entrée.

Le souffle court, je n'arrivais pas à expliquer ce qui venait de se produire et n'importe qui se croirait dingue après une telle rencontre... Pourquoi d'ailleurs était-elle venue... Dessiner ça?

Qu'est-ce que c'était aussi et où suis-je? Autant j'avais des questions qui me fragmentait le peu de mental qui devait me rester, autant je sentais désormais un malaise dans la salle. Je hâtai donc le pas pour quitter les lieux.

J'ouvre la porte de classe, je sors.

Du bruit.

Chapitre 3

Je fronce les sourcils. Je me frotte les yeux. Une élève passe devant moi, en pleine discussion sur son petit copain avec sa meilleure amie. Un élève en face de moi est en train d'ouvrir sa case.

Je regarde à gauche.

Un élève attache ses souliers, deux autres passent devant moi. Le silence avait fait place au chaos quotidien des couloirs de l'école.

Je regarde derrière moi, dans la salle de classe. Jocelyn ramassait ses choses, le cours venait de terminer, le tableau était plein de notes de cours sur la littérature québécoise...

Je semblais être revenue à la réalité... Ou perdais-je simplement la tête? Oui, je perdais sans doute la tête... Avais-je d'ailleurs non seulement quitté la réalité? Je me contente de soupirer de soulagement, pour l'instant. Le stress et la fatigue, sans doute.

Haut de cœur, envie de vomir, toilette... Toilette.

Une main contre ma bouche, je cours à travers les gens qui me fixent à la recherche de la chose qui recevra mon jus stomacal.



Mon sentiment est le  même que sur ta première fic , j'adore !
Vite , une suite !

Chapitre 4
Le reste de la journée n'avait représenté aucune embuche ou événement étrange quelconque. Bref, comme si rien de tout ça ne s'était passé.

Mais pourtant, j'avais encore les effets de la vision d'horreur de mon professeur et du tableau. Plus le temps avançait, plus l'incertitude m'envahissait, plus le doute s'installait. Avais-je vraiment vécu une telle chose?

Assise sur mon lit, seule dans mon appartement, je réfléchissais, j'angoissais, je me rongeais les ongles. Au bout de quelques heures de silence, la fatigue eut raison de moi et je sombrai dans un profond sommeil.

* * *
Quelque chose de chaud et humide se dépose sur ma joue. C'est visqueux. Une odeur nauséabonde envahit les lieux. C'est la nuit, je ne vois rien. Je lève lentement les couvertures, puis je m'assieds. Toilette.

Je me laisse descendre puis je traîne les pieds. Le plancher est froid et dur, drôle de sensation pour un tapis. Je tâte dans le noir à la recherche de la poignée de porte de ma chambre de bain...

Rien. Plus de porte? D'accord.

L'odeur infecte est plus concentrée dans cette chambre... La faible lumière de la nuit qui traverse la fenêtre dans la douche me fait entre-percevoir un rideau usé et troué. Je lève le couvercle de la toilette, puis je vomis.

Chapitre 6

«Prochaine station : Rue Ste-Marie»

Je suis réveillée soudainement. Le métro était silencieux, comme à son habitude. Une énorme migraine martelait mon crâne déjà bien meurtri. La nuit avait été longue et je devais sans doute faire de la fièvre. Je sentais encore ces regards se poser sur moi constamment, comme si j'étais le mal incarné qu'on devait fixer avec dédain et haine. Que me voulaient-ils tous?

Le métro s'arrête. Les portes s'ouvre, laissant entrer une cohorte de gens divers. Je me fraie un chemin à travers le mur de personnages, on m'accroche, on me bouscule, ma respiration s'accélère et, ironiquement, je commence à manquer d'oxygène.

Je parviens à quitter la foule, je souffle un bon coup. Une autre longue journée d'école s'annonçait... Heureusement que nous étions vendredi.

Chapitre 6

Le cours de comptabilité semblait interminable. Les minutes passaient, le professeur faisait son interminable discours à l'avant de la classe plongée dans le noir, éclairée par uniquement la lumière rétroprojecteur.

Je ne l'écoute pas. Je dessine sur le côté de ma feuille de notes, des dessins divers. Rapidement je perds contacte avec le monde rationnel, ou comme on dit dans la langue commune des mortelles : je tombe dans la lune. Je continus de dessiner tout en étant plongée dans mes pensées solitaires.

- Donc, ce sera tout pour l'instant. Je vous donne vingt minutes de pause.

Les déplacements soudains des élèves me tirent hors de mes pensées. Le professeur nous accorde une pause... Un peu d'air frais me fera du bien, surtout après l'horrible nuit que j'ai passé.
Mon regard se pose alors sur ma feuille de notes. Mon cœur fait un bond. Incrédule d'abord, puis anxieuse ensuite, je regarde l'amas de ligne diverses sur le coin de ma feuilles... Le même dessin qui a été fait au tableau hier.

De l'air, j'ai besoin d'air.

Sans attendre, je me lève et comme une fusée, je fonce à travers les gens.

Sortir, je dois sortir. Pas bien, nausée.

Je descends les escaliers, je tourne à gauche, à droite. Une porte de traversée, une arche, encore un escalier...

Respirer, je veux respirer!

Je pousse la porte du toit de toutes mes forces et je prends une grande bouffée d'air. Au loin, je voyais la ville, les maisons. Emporté par l'écho, j'entendais les voitures, les camions, les ambulances, les bruits communs aux villes. Je passe ma main sur mon front puis je soupir.

Les minutes passent, la solitude devient mon allié. Je sens mon rythme cardiaque diminuer, la panique s'évaporer. Je souffle, je vis, je savoure cet instant de paix.

Je regarde ma montre. Le cours allait bientôt reprendre.
Je pousse la porte du toit, je descends les marches et je pousse la porte au pied de celles-ci pour regagner le couloir sans me douter que de l'autre côté, je retrouverais la solitude comme je ne l'ai jamais connu.

20 Avril 2010 à 05:16 #3 Dernière édition: 21 Avril 2010 à 06:06 par Isaac
Chapitre 7

La porte de l'escalier menant au toit se referme derrière moi. Le bruit est emporté par l'écho, perçant ainsi le silence morbide des lieux. Je fais quelques pas, la bouche béante. J'étais de nouveau seule dans les couloirs déserts du collège.

Cette fois, j'étais certaine que je ne rêvais pas. Je ne pouvais faire deux fois le même type de rêve... Et tout semblait si réel. Je sentais la dureté du sol, la fraîcheur du couloir sur ma peau pâle, l'odeur de peinture fraîche des murs et le malaise occasionné par cette absence de vie, de présence, de joie.

* * *
Les toilettes étaient évidemment vides. Je fus prise d'angoisse et de chaleur, ce qui mena ma route aux toilettes les plus proches. Le visage trempée d'eau froide, je referme le robinet et je lève le regard vers le miroir. Il était craquelé, si je voulais me regarder c'était raté.

Roumf!

Je sursaute et je me retourne rapidement. Collée contre le comptoir, je regarde la plus grosse des cabines. La lumière au-dessus flashait, comme victime d'un manque d'électricité. J'apercevais toutefois une ombre au sol. Quelqu'un?

- Hé, il y a quelqu'un?

Aucune réponse.
La personne devait être malade, c'était courant ces derniers temps. J'abaisse lentement mon capuchon en m'avançant vers la porte de la cabine. Je la pousse doucement.

Les mots me manquent pour décrire ce que j'ai vu. Mon cœur fit d'abord un bond, j'eus envie de vomir, de hurler, de pleurer. Une... Chose... Reposait sur la toilette. Imposante, énorme, massive, bosselée, veineuse, dépourvue de chaire à certains endroits, la tête grisâtre comme le reste du corps, absence de visage à l'exception du même trou au centre de ce dernier... Je n'avais pas de nom pour une telle horreur. La chose avait les jambes écartées et un semblant de vagin bien ouvert... La chose accouchait...?!

Mon esprit déconnecta avec le monde à cet instant précis. Même dans mes rêves les plus fous je ne pouvais rêver à une telle horreur... Une erreur de la nature du genre ne pouvait pas exister... Et pourtant... Pourtant, elle était là, à cracher du sang, à uriner du placenta... J'aperçus le dessus d'un crâne humide et poilu être progressivement propulsé à l'extérieur...

C'est à cet instant précis que je pris les jambes à mon cou et quittai les lieux en courant. Je tentai d'aller le plus loin possible des toilettes. Je ne comptais plus les escaliers que je descendais, les portes que je poussais, les couloirs que je traversais. J'avais l'impression de tourner en rond, mais je priais le ciel que ce ne soit pas le cas puisque je voulais aller loin, très loin, me réveiller, quitter ce cauchemars.

Je trébuche.

La respiration haletante, le souffle coupé, je me mets à brailler, littéralement.

Chapitre 8

Je fixais le plafond depuis plusieurs minutes. Le silence devenait de moins en moins présent. J'entendais des gémissements monstrueux un peu partout accompagnés de pleurs de bébés.
Je ne reconnaissais plus mon école. Plus aucune fenêtre, plus aucune sortie, j'étais prisonnière de ce cauchemar qui ne voulait prendre fin. Je n'avais soudainement plus d'énergie pour me relever.

Une respiration saccadée.

Je relève la tête rapidement... Un étudiant. Il semblait chercher son chemin. Je sens soudainement l'espoir renaître. Je m'avance lentement, les pieds trainants.

- Hé... Tu es perdu toi aussi?

L'étudiant se retourne. Pas de visage. Merde.

Il se met à respirer rapidement, j'entends des pas de courses envahir les couloirs, accompagnés de cris stridents, angoissants. Au loin, le couloir est rapidement rempli d'étudiants sans visage, certains crachant un liquide noir à l'odeur âcre.

Mon cœur fait un bond, l'adrénaline envahit mon corps et je me mets à courir malgré moi. Je pousse une porte de classe, je la referme violement et je viens pousser des tables contre celle-ci. J'entends les étudiants se défouler sur la porte, hurler. D'abord la porte, ensuite chaque mur de la pièce... Ils semblaient avoir entouré la salle de classe à l'extérieur.

Je plaque mes mains contre mes oreilles et je hurle. Du sang se met à couler le long des murs jaunâtres. Le tableau se retrouve soudainement envahi d'une centaine de mots... Culpabilité, accident, mort, mort, mort...!

La porte éclate. Les étudiants entrent par dizaines. Je les sens m'agripper, me tirer, me pousser. On me pousse, on me prend, on me dépose, on me gifle, griffe... Je me sens jetée hors de la classe. Plaquée contre les casiers, ils m'entourent et se rapprochent de plus en plus. Je commence à manquer d'oxygène, je suffoque, coincée, prisonnière...

Les étudiants se relèvent et commencent à vaquer à leurs occupations. Ça marche ici et là. J'entends les conversations diverses et le brouhaha des couloirs rompre le silence.
En sueur, les bras encore marqués des coups de griffes, je me relève doucement en tassant quelques cheveux de mon champ de vision... Puis je retombe. Je n'ai plus de force dans les jambes. J'avale ma salive. Je vois quelques étudiants au passage me jeter des regards d'incompréhension. D'autres m'évitent carrément... Comme si j'avais la peste.

Je regarde ma montre... Le cours recommençait dans trois minutes. Avais-je vraiment quitté la réalité? Plus de doute là-dessus : Oui.

Chapitre 9

Je n'étais pas retournée dans mon cours. J'étais passé reprendre mes trucs et sans regarder personne, j'étais partie comme une fusée. Je ne voulais plus remettre les pieds à l'école. École de merde. École de fou. École de dangers.

* * *

Le trajet du métro me parût interminablement long. Les gens me regardaient. Je jetais quelques coups d'œil à mes bras : ça ne saignait pas. Heureusement, même si c'était douloureux.

* * *

Je fermai la porte de mon appartement à double-tour. Je tassai les rideaux et j'ouvris les lumières. Je n'allais pas quitter mon domicile. Plus jamais.
Et contre toute attente, je m'effondrai soudainement, vidée de toute énergie.

* * *

Je fixe ma montre. Une heure et trente du matin. Une vilaine migraine martelait mon crâne. Je me lève, je tousse. Ma lumière est fermée. Je rampe vers la porte d'entrée, j'agrippe la poignée et je me hisse le long de ladite porte. Je tâte l'obscurité à la recherche de l'interrupteur. Je la trouve.
L'ampoule flash. Une fois, deux fois.
Mur plein de sang, culpabilité, gravures du dessin de Jocelyn sur tous mes murs.
Flash.
Parti.

Dans un état second, je ne réagis pas.

Je traîne les pieds vers ma cuisine. Je me cogne le pied contre ma table. Aucune réaction. Je tâte le vide... J'atteints mon comptoir. Je me déplace, pas par pas... L'évier.

Je fais couler l'eau. Elle est étrangement visqueuse et foncée... Puis elle redevient normale. Je m'asperge le visage. Je regarde mes avant-bras : Mes égratignures sont plus nombreuses...

J'ai dû louper un épisode... Mais je ne réagis pas, déconnectée du monde.

Je retourne dans ma chambre et je me couche.

Je sais pas pourquoi je lis ça, c'est vraiment dégueulasse tes histoires x) Mais je trouve pas le texte mal écrit du tout, par rapport au précédent le contexte est plus crédible (même si crédible n'est pas vraiment le mot) et du coup ça fait moins jeu d'énigmes.

Fais juste attention, y a quelques fautes d'orthographes (discrètes mais des fautes quand même) je sais pas si tu les as vues en te relisant, mais fais plus attention aux accords.

Excellente histoire, comme l'autre.
Mais comme à dit Dusclord tes histoires sont un peu gores, en tout cas, c'est pas le genre de truc que je lirais avant d'aller me coucher. ^^

Chapitre 10

Je glisse mon doigt sur le bouton «Lecture» de mon MP3, plongée comme à l'habitude dans mes pensées.

Je regarde ma montre, encore cinq minutes à attendre avant l'arrivée du métro. Je redresse la tête. Les gens passent devant moi, certains pressés, d'autres attendent simplement leur transport. Un samedi comme les autres, un samedi comme on les déteste.

Ma tête est lourde, mes paupières brûlent, mes yeux sont rougies. Je manque de fatigue et rester dans mon appartement me déprimait. En principe, quand je ne vais pas bien, je vais au parc naturel de la ville, c'est paisible, calme et silencieux. Le seul endroit où je me sens vraiment bien en fait.

Le tunnel est éclairé, le métro arrive. Je me lève, je range mon lecteur MP3 dans la poche de mon coton watté. Je m'avance, prête à éviter le troupeau de gens et à m'engouffrer rapidement avant que tout le monde soit coincé dans la porte.

Le métro passe devant moi. Il avance, avance. Entre les compartiments, je vois de l'autre côté de la station. Je fronce les sourcils.

Les gens se décomposent compartiment après compartiment. Les affiches se déchirent, les murs se salissent. Le métro continue sa route, sans s'arrêter, il semble interminable.
Le mur de céramique blanc de l'autre côté prend progressivement une teinte rosée, puis rouge, puis brune.
Le métro s'engouffre finalement dans le tunnel; il ne s'est pas arrêté. Je suis seule dans la station de métro.

- Ça recommence...

Chapitre 11

Je respire, puis je regarde autour de moi. Sur tous les murs était écrit, en graffiti (ou était-ce du sang?) les mots «culpabilité» et «mort». J'avais l'impression qu'on avait jetée des seaux de sang ou de bouette sur les murs, comme si quelqu'un s'était défoulé et avait déversée sa rage sur la décoration.


Ça empestait d'ailleurs le mort.

Spomp.

Un bruit vient rompre le silence. Je regarde autour de moi, plus alerte.

Spomp.

Cela provient d'un des escaliers derrière moi.

Spomp.

Dans l'ombre, j'aperçois une forme, une chose... Imposante... Puis les souvenirs de la toilette de l'école refont surface. J'entends un raclement, suivi d'un gloutonnement dégueulasse, soit mon signal de départ.

Je descends sur la traque du métro, j'enjambe les fils diverses, je grimpe sur le muret qui sépare les deux chemins, je traverse les fils adverses puis je grimpe sur la station. Mes genoux égratignés, la respiration haletante, le dos trempe, je regarde derrière moi puis je laisse échapper un petit cri rapide en voyant que la chose imposante enceinte me suivait.
Je monte rapidement les marches. La billetterie du métro... Cela me faisait drôle de voir l'endroit désert, j'étais habituée de voir l'endroit exploser de gens.
La chose imposante monte les marches, je prends la poudre d'escampette. Je me précipite vers le premier endroit qui frappe mon esprit : La porte des billetteries.

Je l'ouvre et je me rue sous les comptoirs. Recroquevillée dans un coin, j'entends le monstre ralentir, j'entends sa respiration rauque. Je vois son ombre projetée au sol depuis la fenêtre de la cabine de la billetterie. Il se penche au-dessus du comptoir, il bave... Je vois le liquide jaunâtre couler jusque sur mon pied.
Il rote. Accompagnée à la bave se trouvait désormais un liquide gastrique.
Je plaque ma main contre ma bouche, l'odeur est infecte. Je me recule un peu plus vers le coin sous le comptoir... Puis ma main touche un truc visqueux. Je tourne lentement, très lentement la tête, vers la chose touchée...

Des cadavres... de bébé et d'adulte... Empilés dans le coin sombre sous le comptoir. Je tourne la tête vers le reste de la billetterie... Du sang partout, des cadavres partout...
Le malaise parcourt mon corps. Il part de mon cœur, monte le long de mon échine jusque dans ma tête. Mon cerveau analyse ce frisson, puis transmet un signal à mes cordes vocales et à mes muscles qui se raidissent. Je pousse un cri puis je me sors de la cabine à toute vitesse. Le monstre hurle, défonce la vitre de son poing, puis contourne la cabine. Il court. Il me rattrape. Ses pas lourds raisonnent dans tout l'endroit.
Je croise les doigts pour un retour à la réalité. Je grimpe par-dessus le tourniquet, puis je grimpe les marches vers l'extérieur... Enfin, où normalement il devrait y avoir la une rue... Mais comme les choses ne vont pas toujours comme on l'espère, je tombe plutôt sur un long couloir plein de miroirs craquelés, cassés... Sur lequel il est écrit en rouge sang «Culpabilité».

Je cours le long du couloir. La porte au bout semble si loin, mais je cours. Un deuxième monstre imposant se met à mes trousses... Comme si l'un n'était pas assez. Je cours, comme je n'ai jamais couru, je cours pour ma vie.
La porte n'est pas très loin, mais je sens déjà le souffle me manquer. Le poing d'un monstre frôle mon dos. Je serre les dents, puis je me force, je plaque la porte et je tombe à la renverse.

Mon MP3 glisse et s'écrase un peu plus loin. Je relève la tête alors que le métro s'arrête devant moi. Les gens me regardent, me contournent. Je suis à plat ventre sur le sol du quai du métro.

- Avez-vous besoin d'aide madame?, me demande un passant.

Je m'aide de mes bras pour me relever, puis je titube vers le banc, le teint pâle, j'agrippe mon MP3 au passage. Je regarde mes mains... Ils sont tachés de sang. Je les fourre dans les poches de mon manteau. Je regarde mon MP3... La vitre est craquelée. Il ne fonctionne plus.
Le parc n'était peut-être pas une si bonne idée...

Chapitre 12

Le cadran sonne. Je suis réveillée en sursaut. Je passe ma main sur mes yeux... Je ne mets pas de cadran le dimanche...
Je regarde ma montre. Nous sommes lundi... J'ai sauté une journée?! Ou bien j'ai dormi durant tout le dimanche?

Sans prendre le temps de me préparer convenablement, j'enfile mon coton watté gris habituel, je me contente de passer une main dans mes cheveux, puis j'agrippe mes choses et je quitte.

* * *

L'école était encore pleine, comme tout lundi matin qui se respecte. Les gens ne cessaient, comme toujours, de me jeter des regards. Je me contentais dans ce cas de longer les murs et de marcher tête baissée.

Mon premier cours était philosophie... J'allais tâcher de ne pas m'endormir.

* * *

Les écouteurs de mon MP3 discrètement caché dans mes oreilles par mes cheveux, je regardais le prof gesticuler. Les pieds sur la chaise à ma gauche, j'avais une table à moi toute seule. Cela ne me déplaisait pas en un sens. Je regarde les autres élèves. Certains me regardent, murmurent un truc à leur voisin ou voisine sans me quitter des yeux... Je me contentais de détourner le regard, intimidée de tous ces yeux.

On tapote mon épaule. Je retire mes écouteurs puis je tourne le regard. Un garçon, cheveux bruns, barbe courte, yeux bleus. Je ne l'avais jamais remarqué dans ma classe.

- Il y a quelqu'un à côté de toi?, me demande-t-il.

Je fronce les sourcils. Ce n'était pas les places ailleurs qui manquaient et pourtant, il préférait
celle à côté de moi. Une blague? Sans doute
.- Oui, répondis-je alors.
- Tu es certaine? J'aimerais bien cette place
.
Exaspérée et lassée, je retire mes pieds. Le gars s'installe sans me quitter des yeux. J'évite son regard, je fais semblant d'écouter le professeur, je fais ma désintéressée.
Il se penche un peu vers moi.

- Ce prof' est ennuyant à mourir. Regarde-le bien, il fait toujours les mêmes gestes dans l'ordre. Il écrit au tableau.

Le prof écrit au tableau.

- Il va ensuite remonter un peu sa ceinture et rentrer son gros ventre.

Le prof remonte sa ceinture et rentre son gros ventre.


- Il va se frottez le nez avec son index.

Le prof se frotte le nez avec son index.

- Et il va regarder son doigt comme s'il avait fait une trouvaille indésirable.

Le prof grimace en regardant son index et recommence à nous parler avant de se retourner au tableau. Cette observation vient, étrangement, décrocher un petit sourire sur mes lèvres.

- Je savais que cela te plairait.

La cloche sonne, le cours s'est terminé dans le calme. Je ramasse mes choses et je quitte sans me retourner.

J'ai une pause de deux heures avant mon prochain cours. Je décide d'aller piquer un somme au
coin le plus reculé du collège. Une alléchante idée.

* * *

Je me réveille. Une étudiante a échappé ses livres, son amie lâche un rictus. Il me reste encore quarante minutes avant le prochain cours. Je frotte mes yeux, j'agrippe mes livres puis je me lève, la gorge sèche.

Je pars donc à la conquête d'un abreuvoir... J'en trouve une quelques couloirs plus loin. Je me penche... Puis un jet rouge m'asperge le visage.
Je me recule alors que l'abreuvoir coule, déborde de sang. Je m'essuie le visage à la hâte, puis je me recule.

- Non, non, pitié, pas encore, pas encore... Non!

Je sentais les larmes monter à mes yeux, je ne voulais pas revivre ça une autre fois...
Quelque chose bloque mon reculement. Je sursaute, je me retourne. C'est le garçon du cours de philosophie.

- Pas encore quoi?, me demande-t-il.

Je regarde l'abreuvoir, rien d'anormal... Je prends un moment pour réfléchir puis je réponds finalement.

- Rien.

Sans même le regarder, je me dirige vers les toilettes, lieu culte de la réflexion.

* * *
Je m'essuie la bouche, puis je fais couler l'eau de la toilette. J'ai horreur des nausées et puis le goût du sang dans la bouche était désagréable. Je me lave les mains, perdue dans mes pensées, puis je quitte les toilettes. Le garçon m'attendait.
Je ne dis rien, je regarde au sol.
- J'ai oublié de me présenter en passant. Je suis Carl. Tu es...?
- Ellie, marmonnai-je.

Un grincement me fait toutefois lever la tête. Un casier s'ouvre lentement derrière « Carl». Je fronce les sourcils, mais ce dernier ne remarque pas ma source d'attention.
- Un joli nom.

Commentaire typique du gars qui ne sait pas s'y prendre notai-je toutefois.
- Écoute, je ne veux pas prendre vraiment beaucoup de temps, mais je voulais te demander si tu voulais faire le travail de philosophie avec moi.

Je me contente d'acquiescer sans vraiment écouter ses idioties. Le casier s'ouvre de plus en plus dans un grincement infernal...
- Enfin, je te laisse mon numéro de cellulaire si tu as envie de... Parler.

Une main cadavérique se pose sur la porte de la case depuis l'intérieur. La main se crispe. Je blêmis. Mon regard passe de la main au... Nez du gars... De ce «Carl»... Pour éviter son regard.
- Quelque chose ne va pas?, me demande-t-il.

Je ne réponds pas. Je me retenais de partir à la course pour ne pas passer pour une dingue... Et ce Carl était là, je n'étais pas seule. Je tente donc de garder mon calme.
- Tu sembles tendue.

Je déglutis. Il suit finalement mon regard vers la porte de la case. Au même moment, tout se saccage. Je vois les murs se construire devant les fenêtres au loin, je vois les mots en sang apparaître sur les murs, toute surface vitrée se craqueler.
- Pas maintenant, pas maitnenantmrépétai-je à voix basse.

La main cadavérique glisse le long de la porte et se pose au sol. La chose tente visiblement de quitter le casier.

Je sens les larmes couler le long de mes joues, puis je tourne lentement la tête vers...
- Merde...

Carl. Désormais deuxième victime de mon cauchemar vivant.

Je préfère ce "Moi" là au précédent ! Sinon c'est vrai que c'est un peu gore.
Citation de: Les link le 20 Avril 2010 à 19:54
en tout cas, c'est pas le genre de truc que je lirais avant d'aller me coucher. ^^

Mwa si !
La Reine des Ténèbres 2.0 : http://fr.scribd.com/doc/128034226/Rdt
A découvrir et redécouvrir :)
(A tribute to Gabriel10)

Plus de renseignements : http://forums.zelda-solarus.com/index.php/topic,22646.0.html

Content de savoir que tu as gardé ton même humour vahahatiii.  ^_^
Sinon l'histoire est toujours aussi bien avec autant de suspens et d'angoisse.

Chapitre 13
Stupéfaite, je le regarde, il me regarde. Il était bien avec moi. Pourquoi. Je fronce les sourcils, je le tâte du bout des doigts.

- Ellie, je suis bien réel...

Il était bien réel. Ce moment de stupéfaction fut toutefois bref : mon regard se porta à nouveau sur la case d'où sortait, en rampant, une chose grisâtre et maigrichonne (pour ne pas dire squelettique), l'absence de visage commençait à être fréquente, toutefois ce dernier avait la tête craquelé en morceau et le ventre gonflé. Il ne semblait pas dangereux, mais sa simple vue créait en moi un vide, une profonde tristesse, presque de la pitié. La chose rampe de peine et de misère vers moi, je ne bronche pas. Elle tente d'agripper ma cheville. Je ne réagis pas. Je suis là, comme pétrifiée, ou plutôt chamboulée à la vue d'une chose si triste, si... Morte.

- Ellie.

On m'appel, mais je n'entends pas.

- Ellie!

La chose est bottée d'un violent coup de pied. Je secoue la tête et je regarde Carl.

- Cette chose m'appelait..., me contentai-je de dire en regardant l'adolescent.

Ce dernier ne m'écoute pas et m'agrippe le poignet, me tirant de force dans les couloirs chaotiques et malveillants du collège. Dans ma course, je regarde derrière moi. Le couloir se fragmente, craquelé de partout comme une vitre victime d'un impact puissant. J'entends les cris d'enfant et les pleurs au loin, j'entends les bruits de verre cassé. Je me laisse tirée, de force, par un homme que je ne connais pas, mais qui semble victime de mes propres tourments, entremêlés de cris inhumains et lointain.

* * *

La respiration haletante, j'aide Carl à pousser la table contre la porte.

- Combien sont-ils!?, me hurle-t-il.

Je secoue la tête, l'adrénaline coulait dans mon sang comme une drogue.

- Je ne les ai pas comptés!

On donne un violent coup sur la porte. Nous sommes pris au piège dans ce qui était jadis un laboratoire de dissection... Désormais, il ne s'agissait que d'une salle vide pleine de boîtes contenant des poupées et des jouets.
Les coups contre la porte cessent. Nous respirons un bon coup. Carl me regarde, en sueur.

- Ellie, tu vas me dire maintenant ce qui se passe.

J'évite son regard et je me retourne vers une vieille poupée en tissus. L'œil était manquant, les cheveux étaient sales. Je la prends doucement dans mes mains.

- Si seulement je le savais... Un moment je suis à l'école entouré de... (je déglutis)... gens... Et la minute d'après je suis ici.

Une boîte tombe dans le coin de la pièce. Je n'y porte pas attention, après tout la source du bruit vient de là où nous avons pris la table qui bloque la porte...

- Tu dois bien avoir une hypothèse, quelque chose je ne sais pas! T'es maudite? La religion? Merde Ellie, c'est impossible! Même moi je ne suis pas capable d'imaginer de telles horreurs.

J'ai le cœur lourd, ma gorge se serre, mes yeux se remplissent d'eau. La voix tremblante, presque étranglée, je crispe ma main sur la poupée que je tiens avant de la lancer contre le tableau sale sur lequel étaient écrites quelques informations sur les grenouilles.

- Que veux-tu que je dise... Je suis aussi dépassée que toi... Pour l'instant je me contente de survivre.

Carl ne m'écoutait pas, la folie l'avait gagné. Il parlait d'exorcisme, de spécialistes, mais il était inutile de chercher à comprendre. Il ne me comprenait pas.
Silence.
Aucun de nous deux ne parle. Je me retourne vers le coin opposé au sien et je commence à fouiller dans les jouets. Il me tourne le dos et fait pareil.

- Ellie, viens voir.

Je me lève doucement et je m'approche. Carl tenait une photo, une vieille à en juger par les déchirures.

- Ça te dit quelque chose?

Je prends doucement la photo... Un fond noir couvert de craques blanches, comme une vitre cassée.

- Je ne cesse de voir ce genre de dessin partout. J'ignore ce qu'il veut dire.

Je commence à fouiller la boîte qu'il fouillait avec lui. Des centaines de photos, tous la même. Ma main frôle la sienne. Je la retire rapidement et je m'éloigne rapidement. Il était capable de chercher seul. J'ai horreur des contacts physiques de toute façon.

Un bruit soudain.
Je me retourne vers la source... Les informations sur les grenouilles au tableau vert n'étaient plus... Il y avait désormais les mêmes craques.

Un autre bruit.
Nous n'étions pas seuls. Je me lève lentement, les sourcils froncés... Aux aguets, attentives. Un bruit d'étranglement... Je fige, un frisson parcourt mon échine, puis je me retourne très très lentement. Carl.

Une forme humanoïde... couvert de cicatrices, mais en même temps aux allures plastiques comme un jouet... Attachée au plafond par un fil, la tête en bas, en train d'étrangler Carl...

Je me jette sur la poigne. La chose tien solidement la gorge de Carl. Il se débat, ses paupières battent rapidement. Je hurle de le laisser tranquille, je donne des coups, mais ceux-ci s'avèrent faible... La table éclate et la porte s'ouvre. Carl est rapidement tiré à l'extérieur, puis la chose le relâche contre une case. Je me précipite vers lui, il tousse, ébranlé.

Les choses rampent au plafond autour de nous. Je regarde la case ouverte contre laquelle Carl a été jeté... Et je prends lentement une planche de bois dans mes deux mains. Une des marionnettes descend lentement le long du mur sans me quitter du regard, je tente un coup, je rate. J'échappe la planche, Carl la prend et vient frapper à ma place la créature. Il l'achève d'un coup de pied au sol... Tout fut si vite et rapide. Le silence de nouveau, la solitude...

- Tout va bien?, me demande-t-il.
J'acquiesce en silence. Il regarde autour.

- Normalement comment quittes-tu ce genre d'endroit?, me demande-t-il.

- Ça vient tout seul quand on s'y attend le moins... Mais quelque chose me dit que nous ne sommes pas sortis d'ici avant un moment. Mes autres expériences étaient plus courtes.

Il acquiesce. J'évite son regard.

- Cherchons une sortie ou un lieu sûr et attendons dans ce cas.

Il emboîte le pas. D'un geste las, je fais pareil alors que la porte de la salle de classe fond jusqu'à ne plus exister. Le décor était changeant, telle mon humeur à cet instant précis...

Chapitre 14
La bibliothèque était silencieuse et, bien évidemment, différente. Il n'y avait plus de livre, tout était en désordre, des toiles d'araignées partout.

Carl reprend doucement son souffle et pousse une des bibliothèques contre la porte. L'endroit était silencieux, aucune créature ne nous avait suivis. Si mes souvenirs étaient exacts, la bibliothèque était liée au secrétariat, je ne me souvenais plus où par contre. Je contourne, tout en regardant autour, le bureau de l'accueil. L'ordinateur ne marchait évidemment pas. Je décidai donc de fouiller les tiroirs.

Carl me rejoint, mais s'attarde plutôt sur la vieille porte de bois derrière moi, qui mène à l'entrepôt de la bibliothèque, là où les vieux films sont stockés. Je l'entends ouvrir la porte et commencer à fouiller. De mon côté, les tiroirs étaient vides. Une déception plutôt amère.

- Ellie, viens ici.

Je le rejoins lentement. Évidemment, les boîtes étaient peu nombreuses et vides. Au centre de la pièce, un rétroprojecteur.
Je fronce les sourcils, je m'approche lentement.

- Tu sais ce que c'est Ellie?

J'acquiesce doucement. C'était une des pages de notre album de finissants de l'école secondaire... Je reconnaissais certains visages que j'avais perdus de vue.
Ma photo figurait sur cette page.

Ellie James. Le paragraphe à côté était court et bref, mais voulait tout dire.
«Brille.»

J'avais oublié l'auteur ou l'autrice par contre, mon secondaire remontait à un bon moment déjà. Un détail attire mon attention toutefois. Une des photos et sa description sont barbouillés au crayon par le fameux dessin craquelé que je vois partout. Pourquoi?

- Tu sais qui est barbouillé?

Je secoue la tête.

- Pas moyen de l'enlever, j'ai essayé. C'est gravé dans la feuille.

Je m'approche de la toile sur laquelle est projetée l'image intrigante. Je pose ma main contre la surface illuminée. La vue de cette page réveillait en moi un drôle de sensation, une sorte de nostalgie.
Cela ne devrait pas être le cas.
Je tourne les talons sans regarder Carl.

- Ils étaient tous des cons de toute façon.

Je quitte la pièce malgré les appels de Carl. Un bruit de bois craquelé soudain et strident m'arrête. Je me retourne rapidement alors que des planches de bois poussaient depuis le sol, recouvrant le cadre de porte de la salle d'entrepôt. Je me précipite vers le mur fraîchement apparu, je le cogne, je le frappe, je hurle.

- CARL!

J'entendais de l'autre côté une boîte à musique jouer. Sans plus. Je me recule, je cherche une poignée, une faille, une possibilité... Mais non. Mis à part les trois trous dans les planches...
Trois trous. Tous les trois en formes de cœur.
De la poudre de bois me tombe sur les cheveux. Je me recule alors qu'une force invisible gravait un texte dans le bois.

«Cœur de pierre font trois.»

Je fronce les sourcils. Je comprenais le jeu : Je devais trouver trois cœurs de pierre quelque part dans la vaste école si je voulais revoir Carl.

Excellent !
Vraiment excellent !
Continue, tu as un talent pour ça.

Chapitre 15
Dans un moment de rage, j'avais fait éclater la vitre qui recouvrait un plan accroché au mur avec une planche de bois. Ça m'avait fait du bien, et ça avait son utilité : J'avais désormais un plan du rez-de-chaussée.
Trouver trois cœurs de pierre dans un collège qui fait cinq étages et qui est en plus rempli de monstres... Une idée de fou. D'ailleurs, pourquoi prenais-je la peine de faire tous ces efforts pour lui? C'est son problème s'il a été impliqué dans mes histoires... Et de toute façon il est un con, un putain de con lâche comme les autres, comme tout le monde.

... Et pourtant.

Non. J'allais continuer d'explorer l'école et si je tombe par hasard sur un cœur de pierre, cela sera en son avantage.
Je pousse donc de toutes mes forces la bibliothèque qui bloquait la porte puis je quitte les lieux. Un gloutonnement monstrueux à ma gauche m'alerte de la présence d'un obèse. Je prends donc sur ma droite. Le couloir menant à la branche des sciences était inaccessible, une grille énorme bouchait l'accès. Ça m'enlevait une zone à explorer, rassurant. Je prends donc sur ma droite et je longe la bibliothèque. Je regagne le grand escalier.

Le même décor était partout... Vieux, saccagé, plein de toiles d'araignées, craquelés... J'avais l'impression que l'école allait tomber d'une minute à l'autre. Un élément de plus à ajouter sur ma conscience : le fait que le plafond peut me tomber dessus à tout moment.

Par où commencer les recherches...? Je regarde les panneaux directionnels au-dessus de chaque couloir. Mon regard s'attarde à un panneau en particulier : Casiers.
Le meilleur endroit pour débuter ses recherches restent là où on entrepose tous nos secrets les plus intimes.

* * *

Le local des casiers était immense. Tous les casiers étaient rouillés,  tombés, ouverts, saccagés, comme si l'endroit n'avait pas été visité depuis des centaines d'années. La poussière recouvrait le plancher comme de la neige et une odeur de vieux bois ajoutait une touche de plus à cette salle déjà bien sinistre. Ma case était le «1036».

Je m'avance donc, rangers de casiers à la fois. 50, 60, 70, 80... 100...160...200...
J'accélère le pas.

Cling.

Je regarde derrière moi. La porte du local se referme doucement. Une forme massive venait d'entrer dans le local. Mon cœur fait un bond. La chose charge.

Ma gorge se serre alors que j'accélère le pas. Je sentais le sol trembler sous les pieds de la créature jusqu'à moi. Elle vomit son sang habituel en grognant. J'esquive en m'engageant dans l'allée 720. La chose, de par son poids, parvient difficilement à s'arrêter et termine sa course contre des cases. Je les entends être renversés.

Je m'engage entre le 725 et le 726. Je gagne ainsi rapidement l'allée 900. La créature charge contre l'allée 920, créant un effet domino. Je m'arrête sec alors que la poussière est soulevée par la chute des cases. Je plaque ma main contre ma bouche pour filtrer l'air, puis je continus ma course. La créature vient donner un violent coup sur la case 930, l'envoyant dans les airs.

La panique m'étranglait, mais l'adrénaline faisait bouger mes pas. Une case tombe devant moi. Appuyée contre celle à côté, je m'agenouille et je rampe par la petite ouverture triangulaire. Mon chandail coince.

Merde.

Je tire.

Je suis toujours coincée.

Le sol tremble.

Stomp... Stomp... Stomp.

Un coup classique, l'incompétente qui reste coincée, confrontée à l'attente de sa propre mort. C'est le genre de scénario que je m'attendais à voir dans un film, non dans la réalité.

Prise au désespoir, je délaisse finalement mon coton watté, révélant mon chandail à mange courte noir. Je cours de toutes mes forces.

950, 960, 970...

J'y étais presque.

1000, 1020...

La créature était toujours à mes trousses.
1030! 31...32...33...34...
36!

Je me jette à la hâte sur le cadenas. Je tourne vers la gauche un tour, trois tours vers la droite, un tour vers la gauche... Ça ne s'ouvre pas. J'ai dû trop tourner.
La créature est deux rangées derrière moi.
Trois tours à gauche, non, un tour à gauche... Merde. Je recommence.
La créature est une rangée derrière moi.
Gauche, droite, gauche. Le cadenas s'ouvre, tout comme la case, révélant une échelle.
Je m'y engouffre à la hâte. Je sens la main de la créature agripper mes cheveux, puis les relâcher...
Je descends à la toute hâte, puis je m'arrête, comme trop nerveuse pour continuer. Je tremble de tout mon corps, je respire un bon coup, puis je me laisse descendre dans l'obscurité barreau par barreau.

La descente prit cinq minutes tout au plus. J'étais dans une salle sous-terraine, sans aucun doute, à en juger par les murs en terre et les planches de bois qui donnaient une impression de cache secrète. L'endroit était éclairé par plusieurs bougies qui donnaient un air théâtral lugubre à la petite salle creusée à même le sol. Il y avait un autel et...

Je déglutis.

Un cadavre pendu par les pieds, la cage thoracique ouverte. À la place du cœur se trouvait un cœur de pierre. Le visage de l'homme était couvert, mais c'était bien ainsi, son identité ne m'était pas nécessaire. Je m'avance lentement vers le corps, puis j'approche ma main du trou. Je regarde ailleurs. Je tâte la surface rocheuse du cœur, puis je tire d'un coup. Du sang gicle, le corps geint, puis tombe... Il était encore vivant!?

Le sang continue de couler... Un peu trop rapidement. Les murs de terre se retrouvent rapidement imprégnés de rouge et commencent à remuer. J'entends des cris au loin et des pleurs d'enfants. La salle bouge de façon rythmé, presque de façon organique. Tout était rouge sang, presque noir. Je me précipite vers l'échelle et j'entreprends sans hésiter la montée pour quitter ce trou de [...] des enfers.

Pas mal du tout !
J'ai bien le sentiment que tu as fait en sorte que ta Fict soit moins choquante.
J'ai aussi vu quelques fautes d'orthographe par-ci par-là mais rien de bien méchant.
Il me tarde la suite.

05 Mai 2010 à 02:07 #13 Dernière édition: 05 Mai 2010 à 03:55 par Isaac
Citation de: Les link le 04 Mai 2010 à 19:40
J'ai bien le sentiment que tu as fait en sorte que ta Fict soit moins choquante.

C'est surtout que je garde en tête que c'est un forum visité par des personnes quand même jeune (aux alentours de 10-12 ans), donc niveau grossièreté, violence et explicisme, j'essais de doser. J'ai même complètement retiré des phrases qui étaient vraiment de trop.

Une version non censurée pourrait voir le jour ailleurs si le coeur m'en dit, pour l'instant il faudra endurer un peu de soft malgré le côté gore de l'histoire. :)
Mais sois rassuré, les changements ne sont pas énormes. Je change parfois un juron pour un mot plus doux, c'est vraiment rare.

J'aime bien , très bien ecrit , juste quelques répetitions qui me turlupinent  mais a part sa , c'est du tout bon.  :super:

25 Mai 2010 à 07:44 #15 Dernière édition: 25 Mai 2010 à 09:36 par Isaac
Désolé pour le temps que j'ai pris pour mettre à jour mon récit. J'annonce qu'il est officiellement terminé et compte au total 27 chapitres (épilogue inclu). Comme toujours, j'attends des commentaires :)

Chapitre 16

Le monstre n'était plus là. Le silence était angoissant, tout comme l'objet en pierre que je tenais au creux de ma main. Je décidai de retourner dans le hall du grand escalier.
Je traverse donc la salle des casiers rapidement, consciente que cela m'avait pris l'éternité et toute mon énergie pour le faire la première fois, puis je pousse les double-portes.

... Ce n'était pas le grand hall.
Ou du moins si, ce l'était, mais c'était peu coutume de voir un escalier et le plancher au plafond et vice versa. Je notai aussi une sorte de structure en spirale qui faisait la hauteur de la pièce au centre de celle-ci. On aurait dit un os entouré de ligaments et de muscles qui remuaient... Plutôt abstrait et pas nécessairement beau à regarder. Je restai donc bien loin de la chose, peu importe si c'était vivant ou non. Prochaine étape... Le deuxième cœur? Il semble de toute façon que ce soit ma seule option, sous risque de rester coincée ici pour l'éternité.

L'inversement de la pièce me donnait la nausée en plus de me désorienter. Je m'avançais donc prudemment, comme craintive de tomber, vers le couloir «H01», le département de littérature. Ma route est toutefois soudainement interrompue par un élément de décors qui ne semble pas à sa place... Depuis quand retrouve-t-on des portes sur le plancher... Ou plutôt le plafond dans ce cas-ci?

Une porte en bois, sur le sol, couchée au sol, n'attendant qu'à être ouverte. D'un côté, je me disais que ce détail anormal m'indiquait le chemin, de l'autre le tout me paraissait trop facile. Je dois trouver deux cœurs de pierre dans une école déformée envahie de créatures et voilà que le chemin apparaît directement devant moi, sous mes yeux, sous la forme d'une vieille porte en bois?

Je prends quand même le risque et je tourne la poignée. C'était le couloir de l'administration... Vertical toutefois. Tomberais-je si j'entre dans le couloir? Je prends une grande respiration, puis je me laisse tomber, adviendra que pourra.

* * *
La chute fut horrible. J'ai traversé le couloir pour m'écraser violement au bout, contre le mur, sur un matelas souillé par le sang... Avant de retomber lourdement, avec le matelas, sur le plancher... Ce n'était, théoriquement, pas possible de contrer la gravité ainsi... Mais qu'étais-je pour juger une loi universelle alors que tout semblait irréel ici de toute façon.

Je me redresse lentement tout en passant mes mèches de cheveux pendantes derrière mes oreilles. Le couloir de l'administration était sens dessus-dessous... Des portes au plafond, sur les côtés, sur le plancher. Le moindre espace vitré était craquelé. Les murs de plâtres blancs habituels étaient désormais couverts de peinture et de dessins... De vagin, de femme et parfois d'homme.

Toutes les portes étaient cadenassées, à l'exception d'une seule. Je m'avance, les pieds traînants, vers celle-ci. Je regarde l'écriteau sur la porte : « Dr. Catherine Bélanger ». Je fronce les sourcils puis j'ouvre la porte.

À l'intérieur, tous les meubles (divans, bureaux, chaises) étaient tassés sur les côtés de la pièce pour laisser place au corps d'une femme, le visage voilé jusqu'au nez. Les membres écartés, accrochés par des chaînes, le ventre ouvert, je remarque un fœtus de bébé.

Un frisson parcourt mon échine à la vue horrible de la chose. Le fœtus tenait dans ses bras un cœur de pierre... La femme avait la bouche à découvert, avec un cœur de pierre à l'intérieur. Les deux derniers cœurs de pierre se trouvaient donc dans cette pièce... Je referme la porte.

Chapitre 17

Moi, une femme, un fœtus, deux cœurs de pierre. Je m'approche du fœtus encore frais. Je ferme les yeux, je prends une grande respiration, puis je détourne le regard. Je sens le corps froid du fœtus sur la paume de ma main. Je tâte à la recherche du bras, puis je tente de l'écarter du cœur.

« Gurg! »

Le cadavre de la femme s'agite. Je sursaute. Le cœur de pierre dans sa gorge s'enfonce un peu. Je relâche le bras de l'enfant mort, le cœur remonte. Il semblerait que prendre le cœur du fœtus alerte la femme... Peut-être que si je commence par la femme?

Je glisse mon index et mon pouce dans la bouche bleue de la femme et je tâte le cœur de pierre. Je tire doucement. L'enfant se met à pleurer, crier et saigner. Je relâche ma poigne. Le tout redevient normal.

Les deux cœurs sont donc liés, commencer par un « tue » l'autre et vice versa. J'allais devoir passer par un autre moyen. Je fais le tour du cadavre accroché, je cherche, je réfléchis, je ne trouve rien. Comment prendre ces deux cœurs et sauver Carl?

Je me réessaie sur l'enfant, même chose. Les deux en mêmes temps n'ont aucune conclusion positive, cela achève les deux en même temps.

- Tirer le cœur du fœtus enfonce le cœur de la femme dans sa gorge... Peut-être que...

L'idée ne m'enchantait pas. Je regarde le fœtus, puis je regarde la femme. La mère ou l'enfant?

Chapitre 18

Je claque la porte, puis je m'écroule contre celle-ci, la respiration haletante, les joues trempés de larme, le cœur battant. Je me laisse quelques minutes pour reprendre mon souffle.
Je regarde les deux cœurs. Le choix fut difficile, mais en bout de ligne j'avais eu ce que je voulais... Mais à quel prix? Pour avoir les deux cœurs, j'avais dû faire le choix d'enfoncer le cœur dans mon choix, l'achever en bref. Cela eut pour effet de libérer le cœur et de permettre à l'autre de le relâcher...

Je ne devais pas regretter mon choix et aller de l'avant : Carl.

La double-porte à l'entrée du couloir s'ouvre lentement, une invitation à quitter les lieux. Je débouche sur le hall de l'école, j'aperçois les double-portes de la bibliothèque au loin. J'y accours sans attendre. J'enjambe les bibliothèques qui reposent au sol, renversées, je contourne le couloir puis j'enfonce les trois cœurs de pierre. Un « clic » satisfaisant confirme ma progression. Le bois craque, puis casse, révélant la porte de bois. Je l'ouvre puis je me rue dans la pièce.
La pièce est vide, le rétroprojecteur éteint. Mon regard prend un certain temps à s'habituer à l'obscurité.

- Carl?
Aucune réponse. La tension monte progressivement.

- Carl?, tentai-je alors de nouveau.

Je m'avance lentement.
« flac »

Je baisse la tête à mes pieds. J'ai dû marcher dans une flaque d'eau... Une flaque d'eau bien opaque d'ailleurs.

Du coup je réalise.

Je suis la flaque opaque du regard jusqu'à sa source déjà bien évidente. Le cadavre de Carl reposait, le torse ouvert, les yeux manquants, les bras bien ouverts, sur le dos, la bouche béante. Je fige d'abord, comme incrédule, puis je réalise la chose que je vois.

La voix tremblante, la gorge serrée, je sens mes muscles céder. Je tombe à genoux puis j'éclate en sanglots, je hurle, je frappe le sol de toutes mes forces, détruite par ma découverte, détruite par la perte du seul être qui pouvait me comprendre.

- NOOOOOOOOOOOOOOOOON!, relâchai-je finalement.

Les larmes coulaient le long de mes joues, j'avais le souffle coupé, la gorge étroite. Mes mains se crispent sur ses vêtements. D'une voix presque inaudible, je tente de communiquer mes derniers mots, mes dernières paroles.

- Je m'excuse Carl... Pour tout.

Puis je dépose ma tête sur son corps, en larmes. J'entends des exclamations, des dénies. Tout devient plus clair.

Je relève la tête, je suis entourée d'étudiants. Ils me regardent tous, l'air stupéfaits, troublés, incrédules. Je suis de retour dans la réalité... Je regarde mes mains recouvertes de sang, puis le cadavre de Carl. Une bonne poigne agrippe mon bras. Je me débats, je hurle, je frappe. J'accroche un de ceux qui me tirent, mais on insiste, ils sont plusieurs.

- TENEZ-LA!

Je hurle de nouveau.

- LAISSEZ-MOI! LAISSEZ-MOI TRANQUILLE!

Je sens finalement une seringue s'enfoncer dans la peau de mon cou. Ma vision devient trouble, puis s'assombrit progressivement alors qu'on tire mon corps inerte.

Chapitre 19

Un halo lumineux apparaît, puis disparaît.

Bip... Bip... Bip...

Un autre halo lumineux apparaît, puis disparaît. Des voix, lointaines.

Bip... Bip... Bip...

Qu'entends-je? Est-ce mon cœur? Je suis... Vivante?

Bip... Bip... Bip... Bip...Biiiiiiip...

Je suis là, je suis là pour toi, je ne suis pas bien loin... Reste avec moi.

- On la perd!

Chapitre 20

J'ouvre les yeux. La pièce était vide à l'exception du lit qui me tenait, les murs d'un blanc impeccable. Une petite fenêtre au sommet du mur éclairait la pièce. On ouvre la porte. Un homme entre en blouse blanche avec une chaise. Il dépose la chaise en face du lit.
Je m'assieds sur le bord du lit. Il me fixe, je fais pareil. L'homme était sans doute dans la trentaine, les traits étirés par la fatigue, mais le regard bien veillant. Une barbe courte rousse et les cheveux renvoyés vers l'arrière donnait un air sympathique à l'homme au regard de noisette.

- Ellie, c'est bien cela?

J'acquiesce, perplexe.

- Où est Carl, comment va-t-il?

L'homme pince les lèvres. Il ouvre son carnet de notes, tourne les pages en prenant bien soin de lécher son pouce entre chaque mouvement. L'homme me jette quelques regards rapides, puis prend une grande inspiration.

- Et si nous parlions de toi, Ellie. Comment te sens-tu, toi?

Je note son détournement de sujet, mais je n'insiste pas, je dois me prêter à son jeu, je ne suis pas en position de négocier.

- Je me sens drôle et égarée.

Une réponse qui devrait le satisfaire. L'homme acquiesce. Il prend la parole.

- Ne te sens-tu pas parfois... Comment dire... Déconnectée? Comme séparée de la réalité?

Je fronce les sourcils. Il poursuit.

- Ne verrais-tu pas, par hasard, certaines choses? N'au...

- Je ne suis pas folle.

L'homme me donne son air sympathique soudainement détestable.

- Ne t'inquiète pas Ellie, je ne suis pas là pour t'accuser d'être quoi que ce soit, j'essaie
simplement de t'aider.

L'homme griffonne quelques trucs dans son carnet, puis se redresse.

- Tu as encore besoin de repos, je vais te laisser te reposer. Carl passera te voir dès que
possible.

L'homme se lève, puis quitte la pièce.

- Je suis Dr. Harrisson en passant.

La porte se referme derrière lui. Je ramène mes jambes contre moi, le cœur lourd, puis je fixe  le vide. Je ne suis pas folle, non, je ne suis pas folle, j'avais bien du sang sur mes mains, j'ai bien senti les débris lorsque la créature m'a chassé dans la salle des casiers, j'ai bien senti le matelas, on ne peut pas s'imaginer ça, non, il doit y avoir une explication rationnelle, quelque chose qui
m'est arrivé il y a fort longtemps, quelque chose que... J'ai cherché à oublier?

Spoc.

Je redresse rapidement la tête. On cogne dans le mur de la pièce d'à côté.

Spoc.

J'entends un énorme cri d'agonie.

Spoc.

Le mur craque.

Spoc.

Le mur cède. À travers le nuage de poussière, j'aperçois une forme imposante dans le trou fraîchement créé. Une fente, comme une sorte de bouche verticale, s'ouvre lentement, faisant glisser dans un liquide visqueux un fœtus géant de créature.

Je me précipite sur la porte de ma pièce qui s'ouvre... Facilement. C'était un long couloir avec plusieurs portes de fer, comme une prison. Je cours le long de l'allée alors que je sens la créature défoncer les murs à travers les salles adjacentes. La porte de sortie est barrée, il faut une clef.

Merde.
J'agite les bras vers la caméra de surveillance... Étrangement, ça fonctionne : La porte s'ouvre. Je débouche dans un autre couloir silencieux.

Je m'avance, incertaine, aux aguets, en habit de patient bleu. Le sol était froid et humide à la fois et tous les murs étaient blancs. Au loin, une enfant, une fille, agenouillée au sol. Elle dessine. Je m'approche.

- Qui es-tu?, dis-je.

La fille se redresse et se retourne vers moi. Vêtue d'une robe d'été blanche et d'une petite chemise jaune, les cheveux blonds, elle me regarde avec un sourire rayonnant.

- Je me nomme Conscience.

Je fronce les sourcils.

- Les réponses que tu cherches ne sont pas bien loin Ellie. Elles sont à l'hôpital... Sauras-tu,
toutefois, combattre la folie de ce lieu et trouver la sortie?

Elle se penche et dépose un crayon de feutre qu'elle fait rouler vers moi.

- Le rouge est une bien belle couleur. Elle s'agente bien à tes mains.

L'enfant s'avance vers moi lentement. Une tache rouge grandissante apparaît alors sur la robe blanche de l'enfant à la région du pubis. Du sang coule le long de ses jambes nues.

- Je suis plus qu'un simple nom à tes yeux en ce moment Ellie...

Je recule, horrifiée.

- N'est-ce pas?

L'enfant s'écroule au sol, parcouru de spasmes divers avant de s'immobiliser, mort.
Je me penche et je prends le crayon. Je l'ouvre. À la place du feutre se trouvait le bout d'une clef.

Je devais trouver la sortie.

Chapitre 21

Toutes les portes de ce nouveau couloir étaient verrouillées à l'exception de la salle des archives. Je n'avais rien trouvé de pertinent, à l'exception d'un dessin d'enfant accroché au mur. C'était un dessin d'une mère, d'un père et de leur fille, une famille heureuse en bref, avec au fond un bâtiment avec un gros « H » sur la façade. Une famille heureuse qui quitte l'hôpital, oh combien symbolique avec la précédente discussion.

Que faire maintenant? Les archives n'avaient rien d'intéressant... Bien que, techniquement parlant, je n'avais fait que survoler, par paresse... Je me voyais donc contrée de chercher en profondeur.

Je glisse donc mon doigt le long des lettres. Je m'arrête sur « C », puis je cherche dans les dossiers.

Rien sur Conscience... Peut-être Carl? Rien non plus sur Carl. Je referme le tiroir « C », puis je m'attarde au tiroir « E ».

Elisabeth Clark. J'ouvre le dossier. Il est vide, à l'exception d'un petit bout de papier bien plié. Je le déroule, puis je suis soudainement victime de nausée. Pas encore?! Je me précipite vers le coin le plus éloigné de la pièce pour vomir. Je tousse, la gorge irritée, puis je reprends mon souffle. Je m'éloigne doucement et je prends le papier plié dans mes mains.

C'est une sorte de plan des lieux... À en juger par celui-ci, c'était un vrai labyrinthe. En grand titre au haut de la page, je pouvais lire « La folie ». Une croix signifiait sans doute mon emplacement.

Je quitte la salle des archives, puis je prends la gauche. Je réessaie les portes : Cette fois, elles s'ouvrent.

Je prends sur ma gauche, puis la droite, puis tout droit. Cul de sac. Je reviens sur mes pas, je dois prendre gauche? Ou droite? Droite. Encore un cul de sac. Les murs blancs commençaient à me donner des nausées en plus de me fournir une impression de claustrophobie. Génial.

Les lumières flashent... Il ne manquerait plus qu'une panne de courant...
Elles flashent de nouveau. J'entends au loin des cris, des grognements... Les étudiants sans visages sont ici!?

Je ne dois pas tarder. Je me mets à courir. Gauche, non droite, droite, ensuite gauche... Une porte? Je l'ouvre. La bibliothèque de l'école?! Je me précipite vers le petit entrepôt derrière le comptoir, je plaque la porte d'un bon coup d'épaule puis je la referme derrière moi. Je me retourne puis je sursaute.

Le Dr. Harrisson discutait... Avec Carl? L'entrepôt était désormais un bureau, avec un divan et un ordinateur.

- Je vais vous laisser discuter.

Le docteur quitte la pièce. Bouche bée, je fixe Carl. Je traîne les pas vers lui.

- Carl... Je te croyais...

- Mort? Pourtant je suis bien là.

- Je ne suis pas certaine...

Il prend lentement ma main. Il me tire doucement vers une porte en bois entre deux bibliothèques remplies de diplômes en psychologie. Il l'ouvre. Nous nous retrouvons cette fois dans le vrai entrepôt de la bibliothèque. Il dépose un baiser dans mon cou.

- Carl... Que ...

- Shh, ils ne nous trouveront pas ici. C'est excitant, n'est-ce pas?

Il dépose un autre baiser dans mon cou. Puis il en dépose un sur me coin de mes lèvres, puis sur celles-ci. J'entoure son cou de mes bras, mes mains se crispent dans le tissu de sa chemise. Il me pousse lentement contre un mur alors qu'il retire doucement ma chemise de patient. Il embrasse la base de mon cou, puis ma poitrine. Je l'embrasse à mon tour, avec fourgue, avec envie, avec amour.

- Tu m'as manqué Carl..., murmurai-je.

Toujours aussi bien, mais il y a des moments où je trouve qu'il y a trop de similitudes avec ta première histoire.
Ceci dit c'est plutôt normal car elles se situent dans le même univers.

26 Mai 2010 à 18:49 #18 Dernière édition: 27 Mai 2010 à 19:20 par Isaac
Chapitre 22

J'ouvre les yeux. Nue, sur le sol, je tourne la tête vers mon partenaire... Il tourne la tête vers moi.

- OH MON DIEU!

J'ai un geste de recul, je me précipite vers un des coins de la pièce. Carl n'avait plus de yeux, il avait les lèvres bleues, son corps était froid... C'était le cadavre que j'avais découvert.
Je plaque ma main sur ma bouche puis je retiens mon cri, désormais consciente de ce qui se passait... J'agrippe rapidement mes vêtements de patient puis je quitte la pièce à la hâte... Retour dans le bureau de Dr. Harrisson. Je referme la porte derrière moi puis je la verrouille.

- Ellie! Ellie!

Il cogne dans la porte depuis l'autre côté. Je me plaque contre celle-ci pour mieux la retenir, ne sait-on jamais.

- Ouvre, c'est moi, je t'en supplie, ne m'abandonne pas.

- Je n'ai plus...

Me ferme les yeux, j'éclate en sanglots.

- Ellie, s'il-te-plaît, je t'aime mon amour...

- Tu n'es pas... Réel.

Je serre les dents, je relève la tête lentement.

- Tu n'as jamais existé Carl, va-t-en.

- Ellie, ne dis pas ça, tu sais que c'est faux.

- L'homme que j'ai aimé ne se nommait pas Carl. Tu n'existes pas.

- Ne dis pas de sottises Ellie, s'il-te-plaît ouvre... J'ai peur ici tout seul.

Je prends une grande respiration.

- Tu n'es pas réel, je n'ai plus besoin de toi. L'homme que j'ai aimé s'appelait Josh, et il est mort. Laisse-moi tranquille, substitut.

Je le sens encore frapper quelques coups contre la porte, puis le tout s'arrête. J'éclate en sanglots.

Chapitre 23

Elle résiste! Je crois que nous pouvons encore faire quelque chose...

* * *

La porte du bureau de Dr.Harrisson s'ouvre... Laissant entrer ce dernier, avec son éternel calepin. Il me fixe, je fais pareil.

- Vous savez ce qui se passe Harrisson... Que dois-je faire?

Il me regarde avec son air compatissant.

- Combattre. Tes réponses se trouvent à l'hôpital. La salle 204.

Il se déplace vers son bureau et y dépose des clefs.

- Prends ma voiture pour t'y rendre, elle est stationnée au stationnement sous-terrain B4.

- Et vous?

- Nous nous reverrons... Après. Bonne chance Elisabeth. Sois prudente sur la route.

Je baisse lentement la tête. Je m'avance vers son bureau. Je prends les clefs. Il dépose une main chaleureuse sur mon épaule.

- Tu es toutefois consciente que tu n'aimeras sans doute pas ce que tu vas y découvrir...

J'acquiesce. Je quitte la pièce.

Chapitre 24

Retour aux éternels couloirs blancs. Je traîne les pas, comme vidée de toute énergie, puis je marche...

Gauche... Tout droit... Droit... Gauche... Je m'arrête, confrontée à un monstre au ventre gonflé endormi qui bloque le couloir, puis je prends droite. Au fur et à mesure que j'avançais, les lumières perdaient de leur intensité, du sang commençait à tacher les murs et le plancher devenait de plus en plus froid.

- Ellie... Ellie!

On m'appelait.

- Ellie! Ellie!

- Je suis là... Tu sais que je ne suis jamais bien loin.

- Alors viens, suis le son de ma voix.

Plongée désormais dans l'obscurité, je me laissais guider par une berceuse murmurée.

Oh toi qui cherche ton chemin,
Écoute ce petit refrain,
Il ne faut pas pleurer ce qu'on a perdu,
La vie vaut la peine d'être vécue,

De nos pertes on gagne,
Malgré cette hargne,
Il faut sourire sur ce qu'on a,
Et non sur ce qu'on n'a pas.
Avance, avance petit ange,
Ce soir ce sera ton repas,
Avance, avance petit ange,
Ce soir tu ne mourras pas.


Une porte de sortie de secours. Je la pousse. Verrouillée. Je fouille donc dans ma poche puis je sors le feutre-clef que j'ai obtenu de Conscience tantôt. J'entends les créatures hurler et courir vers moi. Je me presse, j'inserts la clef puis je la tourne : La porte s'ouvre. Je descends les marches à toute vitesse. B1...B2...B3...B4!
Je pousse la porte du stationnement intérieur... Mais un étudiant sans visage retient mon bras. Je me retourne. Il hurle.

- Pas cette fois putain de créature!

Je viens donner un violent coup de poing contre le crâne de la créature. Elle relâche sa poigne.
Je sors de mes poches les clefs, puis je fais sonner la voiture en question. Je traverse les rangers de voiture...

Une voiture est soudainement soulevée et projetée contre le mur du fond. La gigantesque créature qui a craché un fœtus tantôt... Était en fait deux énormes bras, la chaire vive, joints ensembles par une bouche verticale... Elle agrippe une autre voiture et la lance vers moi.
La main tremblante, contrôlée par l'adrénaline, je déverrouille la portière de la voiture. J'échappe les clefs.

Je me penche et je les reprends malgré le sol tremblant. La créature approche. J'entre dans la voiture, je la démarre, puis je fonce. Je passe entre les jambes de la créature, je défonce la barrière de sécurité et je monte la pente du stationnement sous-terrain, gagnant rapidement l'air libre et la route.

L'hôpital n'était pas bien loin, peut-être une dizaine de minutes en voiture.

Ca fait un p'tit moment que je lis ton histoires sans laisser de commentaires, il est donc temps !

Bref, j'vais pas y aller par quatre chemin, j'adore ta façon d'écrire et tu as une sacrée imagination, avec une intrigue qui me plaît totalement qui nous tiens tout le long de la lecture. Continue !  :)

27 Mai 2010 à 19:35 #20 Dernière édition: 28 Mai 2010 à 08:03 par Isaac
Enfin nous y voilà, la fin du deuxième "Moi". :)

Chapitre 25
- Nous pouvons les sauver? Si oui, faites tout votre possible...

* * *

La route était déserte, évidemment. Mes mains crispées sur le volant, je regardais la route, attentive malgré tout.

- L'hôpital, la salle 204... L'hôpital, la salle 204...

J'entends des sirènes. Une ambulance et des voitures de police me contournent. Je fronce les sourcils. Ils disparaissent dans la tempête de neige.
Je reste concentrée... Puis je revois les gyrophares à travers la brume. Une voiture s'était écrasée contre un arbre. Je voyais les ambulanciers transporter les corps dans leur voiture, les policiers discuter entre eux. L'ambulance me rattrape, me contourne, puis disparaît encore dans le brouillard. J'accélère pour la garder bien en vue... Et comme prévu, j'atteins l'hôpital. Je me stationne vis-à-vis l'entrée et j'entre à la hâte, torturée par le froid, dans l'établissement bondé de monde. Suis-je dans la réalité?

- Je peux vous aider mademoiselle?, me demande la préposée à l'accueil.

- Je cherche la salle...

Je suis coupée par l'arrivé des ambulanciers qui poussaient à travers les couloirs un lit roulant.

- Poussez-vous!, hurlaient-ils.

Je décide de les suivre. Ils se précipitent vers l'ascenseur. Je les suis à toute vitesse.

- Madame, hors de l'ascenseur s'il-vous-plaît!, me lâche un des médecins.

Je tourne la tête vers l'escalier de secours, je la grimpe à toute vitesse.
Je gagne le deuxième étage en même temps que l'ascenseur. Je les suis. Ils se dirigent vers l'aile « 200-210 ». Toujours sur leurs pas, ils poussent le lit roulant dans la salle « 204 ».

- Madame, poussez-vous!

Je me tasse rapidement pour laisser passer un second lit roulant vers la salle « 205 » cette fois.
Je m'approche doucement de la chambre 204 puis je regarde par la fenêtre...

Chapitre 26

Les médecins et chirurgiens retirent la couverture qui couvrait le corps sur le lit. Je me vois.
J'écarquille les yeux.
Un médecin me tasse et entre dans la pièce.

- Que s'est-il passé?, demande-t-il à la hâte à ses collègues en enfilant ses gants.

- Un accident de voiture.

- Ses blessures sont graves?

- J'en ai bien peur.

Une lumière s'éteint dans le couloir « 200-210 ».

- Comment se nomme-t-elle?

- Selon les cartes d'identité, elle se nomme Elisabeth Clark, 33 ans. Son époux est dans l'autre pièce, plus endommagé je crois.

Une seconde lumière s'éteint dans le couloir « 200-210 ».

- Elle a une chance selon vous?

- Si elle en a, elle est minime.

Une troisième lumière s'éteint dans le couloir « 200-210 ».

- Combien de temps avons-nous?

- Très peu.

La quatrième et dernière lumière s'éteint dans le couloir « 200-210 », plongeant le couloir dans une obscurité des plus totales.

Chapitre 27

On ouvre une lampe de chevet. Dr. Harrisson me regarde, puis s'installe dans le fauteuil en face du divan noir sur lequel je suis assise. Son regard se plonge dans le mien, puis il griffonne quelques trucs dans son calepin. J'essuie mes joues.

- C'est un phénomène commun chez les gens, Ellie. Le « Moi » est une chose bien complexe et chacun l'interprète à sa manière. Nous avons progressé aujourd'hui, vous avez réussi à dénier l'existence de Carl et à assumer votre responsabilité dans l'accident.

Dr. Harrisson se lève, puis se tourne vers la fenêtre de son bureau glacée par le froid de l'hiver.

- Il ne faut pas avoir honte. Une dispute entre vous et votre époux éclate au sujet d'une certaine « nouvelle », bonne ou mauvaise, un camion apparaît de nulle part à travers la tempête en plein milieu de votre querelle et dans une tentative de l'éviter, vous finissez contre un arbre, entraînant votre époux dans la mort... Votre premier réflexe est de dénier sa mort, ou de créer un substitut pour pouvoir aimer de nouveau... Et de vous isoler dans un monde qui est vôtre au plus beau moment de votre vie... L'école, le collège, lorsque vous étiez jeune, matérialisation de vos propres tourments. Le réveil n'est pas bien loin Ellie... Les médecins se battent pour vous réveiller, pour vous sortir de ce monde. Il faut simplement accepter totalement les faits.

- Je suis inconsciente depuis combien de temps?

- Plusieurs mois. Je suis passé vous voir tous les jours.

Je prends une grande respiration. Puis je regarde à mon tour vers la fenêtre.

- C'est bientôt Noël, n'est-ce pas?

Dr. Harrisson acquiesce. Il se retourne vers moi.

- Le choix vous appartient Ellie. Vous pouvez vous réveiller, ou continuer de vous imaginer une vie de rêve... Mais soyez consciente des conséquences de votre choix.

Je me lève donc lentement, épuisée, puis je regarde la porte de sortie du bureau. Je pince les lèvres, hésitante.

Aube

Le couloir de l'hôpital était plein et bondé comme à son habitude. Les médecins pressés contournaient la femme, les familles des patients étaient assis ici et là. Un homme se frustrait contre une distributrice.

- C'est ici, lui dit une docteure.

Elle regarde par la fenêtre de la porte « 203 ».

- Pour l'instant cela semble stable, l'autre n'a pas survécu. Il est maintenu artificiellement en vie... Son sort vous appartient.

La femme entre dans la salle. Un berceau éclairé par les rayons qui traversaient les larges fenêtres reposait au centre de la pièce. Elle s'en approche, puis se penche vers ce dernier. Des bébés jumeaux... Un garçon et une fille... Le garçon était inerte, la fille agitait les membres frénétiquement. Son regard bleuté se pose dans celui de la femme qui esquisse un bref sourire...
La porte de la salle « 203 » se referme rompant le silence des lieux alors que le bruit est emporté par l'écho. Peut-être qu'après-tout, pour cette femme, Noël ne sera pas symbole de solitude pour son...

MOI

Vraiment une magnifique histoire comme toujours Isaac.
Je commence à mieux comprendre ce qu'est le "Moi".

En tout cas, bravo.   ^_^